La baisse des licenciés dure depuis 2010. Les passeports des estivants servent de paravents à l'échec notable de la politique nationale de l'équipe Champion. Faisons le bilan d'un beau printemps du catamaran de sport français porté par des énergies positives.

En 2014, l’hémorragie des licenciés continue, mais le catamaran de sport forme moderne du sport voile résiste.

Fin 2013 la forte progression du chiffres de classés en Hobie Cat 16 faisait tordre des nez d’analystes fédéraux chagrinés au prétexte que: « vous vous rendez compte près de 80%  des 615 classés n’ont fait qu’une régate ». Il y a de quoi sourire, non ? C’est sur qu’une baisse franche et constante des licenciés, c’est à dire les pratiquants et coeur des clubs qui partent faire autre chose, c’est bien mieux.

Cela montre surtout une totale incompréhension de l’évolution de notre société. Un oukaze fédéral ne permet pas d’assurer le succès d’une régate, surtout lorsque la déconnection avec le terrain est consommée. Comme chez Lucky Luke: une part de haricot et une part de lard ne font pas deux parts d’haricots au lard, camoufler l’échec des politiques de développement et la baisse induite des pratiquants derrière l’intersérie imposée, pour faire grosse flotte devient risible.

Une politique  fédérale dogmatique qui gêne les dynamiques locales et des classes mais n’a pas réussi à entraver un beau printemps du catamaran de sport hexagonal

En 2014, l’hémorragie des licenciés continue de même que la politique qui gêne les dynamiques locales et des classes. Cela au nom d’un dogme qui s’applique et malheureusement en échec depuis 10 ans maintenant chez nos camarades du skiff. Peu de succès en développement de cette intersérie forcenée, surtout si l’on regarde au-delà nos frontières où réussi la méthode des classes et de la régate en temps réel.

Les 21 Classe A  du club de Sanguinet interdits de grade 4 car ils en ont déjà trop (sic !), les HC16 transformés en  SL16 en Poitou-Charentes, les 11 Dart 18 de la régate du club Arradon perdus dans les limbes fédéraux ou la quinzaine d’Hobie 16 sudistes venus sur une régate avec leur catégorie dans l’avis de course  et qui se voit classés en intersérie. Cela  au mépris de l’annexe J des règles de course. Tout va bien.

En face de ce marasme réglementaro/jacobino/soviet central, il faut regarder, apprécier et souligner en contrepoint l’énergie de la passion des femmes et hommes qui portent notre sport. 53 Classe A sur le Championnat de France à comparer à 51 Classe A sur le Championnat Nord-Américain, pour comprendre la superbe dynamique d’un support exigeant, des passionnés et des clubs qui les portent.  Dynamique qui  rassemble 120 Classe A pour une vraie épreuve internationale à Maubuisson organisée par le CV Bordeaux dans les jours à venir.

Et aussi une coupe méditérranée avec le club de Cavalaire, appréciée des Dart 18 après un Championnat du Monde organisé avec brio par les bénévoles/permanents du clubs de Carnac 2013 avec plus de 110 équipages, la convivialité à terre des dartistes et leur férocité sur l’eau constituent un joli-mix qui ne se décrète pas dans un bureau fédéral. Force que chacun peut comprendre sans  l’aide de coûteux conseils en marketing, payés avec l’argent des licences. Pas besoin de logo , ni de soirée d’apparat à 95.000 € chacun, ni de siège social à 25.000 €/mois, juste de la compréhension, du travail et je rajouterai: un peu d’humilité.

20% de jeunes classés en F18 et plus de 50% en HC16 qui n’ont toujours pas le droit à un vrai Championnat de France espoir moins de 25 ans

Plus de 40 F18 pour un national réussi dans un beau club nordiste. Association française qui a pris le risque de s’éloigner des grosses flottes d’une série initiée par et avec les moyens d’une fédération, qui savait à l’époque écouter ses pratiquants. Cette Association française F18 qui reste un réservoir majeur des épreuves internationales comme le mondial 2013 avec 160 Formule 18 en Toscane. James Baeckler de nouveau élu avec son équipe a raison d’exiger que l’association internationale respecte ses engagements de transparence et de développement au service des pratiquants et des jeunes.

Françoise Dettling avec l’équipe des hobistes déjoue les petits tracas administratifs pour faire une coupe Nationale avec un club de plage Yagga. Rendez-vous qui progresse en effectif chaque année depuis 3 ans et confirme le succès du Championnat de France de fin 2013. Avec, en prime une cinquantaine de jeunes de minimes à espoirs inscrits à cette épreuve à rapprocher du fait que le bureau exécutif de MM. Champion, Churet et Fraboulet a rejeté en début d’année le projet porté par Frédérique Pfeiffer et moi-même,  d’accorder un vrai Championnat de France espoir c’est à dire moins de 25 ans aux classes (pas seulement catamaran) réunissant une quinzaine d’équipages  moins de 25 ans, sur leur national de printemps.

Imaginer l’effectif jeune avec ce petit plus fédéral quand on voit que plus de 50% de la flotte Hobie 16 classée  en 2014 est jeune selon la FFVoile. Tant pis les Hobie et les F18 (une importante partie -20%- de la flotte 2014 F18 est  jeune toujours selon les statistiques fédérales) continuent d’avancer. Dans le même temps l’effectif des jeunes baisse… Circuler il y a rien à voir !

Nous devons résister jusqu’en 2016 et gagner des élections qui devront être dignes des enjeux.

Il faudra  se souvenir de cela et le répéter afin que chaque Président de club vote pour des délégués soutenus par une équipe qui a un vrai  projet avec des mesures concrètes et non pas des incantations vagues masquant une politique qui se construit de manière opaque. Et surtout voter pour des femmes et des hommes avec des réussites à leur actif, des réussites locales, et nationales et pas une équipe usée par un  -trop ?- long exercice du pouvoir et qui a l’échec comme bilan.

Cela dépasse le catamaran: les dériveurs les Opimist, Laser, 5O5 et Finn travaillent en autonomie, mais aussi nos amis du kite qui se tiennent justement à l’écart de la FFVoile et qui ont été confortés par la décision du Ministère et du Conseil d’Etat de ce début d’année. Les planchistes ont leur association et beaucoup d’arbitres s’interrogent sur ce qu’ils observent week-end après week-end. Ici l’achat uniquement de dériveurs sans appel d’offres et court-circuitage du Conseil d’Administration, ce n’est pas « toute la voile » et on peut se poser des questions sérieuses sur la gouvernance actuelle. Quand on sait que  le président Champion attribue la baisse des licenciés à la conjoncture, on doute légitimement d’une capacité de remise en question. Comme un régatier qui ne sait pas s’adapter au changement et qui incrimine le vent, les autres, la chance: cela patine. En quelques années, on peut rajouter que deux des principaux partenaires ont arrêté de financer la FFVoile. Tout va bien, bis.

Franck Tiffon, administrateur de la FFVoile liste Frédérique Pfeiffer: « Changeons NOTRE fédération »

Lien vers une analyse de notre fédération

La baie de Quiberon, grand spot de la pratique catamaran, va voir cohabiter à partir d'aujourd'hui, les 15 SL16 français à l'ENV pour la sélection ISAF et 165 catamarans de l'Eurocat. Ces deux événements illustrent à leur manière la tendance de notre pratique. photo: Franck Tiffon.

Notons quelques  clefs de cette évolution qui doit moins à une explication économique, qu’à windguru et repose principalement sur une maturité de notre sport et de ses pratiquants. Non je n’ai pas écrit que le catamaran était devenu un repère de croulants ;-) . Bien au contraire cette approche procède aussi, comme on va le voir d’un affutage, d’une pratique plus pleine, intense  et qualitative de notre sport. La recherche des bonnes conditions de vent et windguru à 7 jours font certes des dégâts pour les organisations pas bien implantées et qui ne savent pas proposer un cocktail incitatif fort. Cependant, si la recette du gâteau change, cela ne veut pas dire qu’il est moins savoureux.

Rejoindre sa tribu et l’importance du travail des Classes.

Le dernier exemple en date est celui des Dart 15 sur l’Eurocat. De manière inédite, pas moins d’une quinzaine du petit frère du Dart 18 débarquent d’Albion afin de jouer ensemble dans la baie de Quiberon ce week-end. Ironiquement la meute des solitaires  british (comme les Viper, les F16 ou les D18) vont faire vivre un Championnat de France intersérie qui est censé alimenter les classes. Le monde vrai, mais à l’envers des tenants de la pensée unique fédérale, imposée sans grand succès. Cette énergie se retrouve dans les 120  préinscriptions pour  l’Européen Classe A du mois prochain à Maubuisson, malgré le dilemme de cette série (je vole ou je vole pas ?) et le succès des Championnats du monde 2014  HC16 (500 participants)  en Australie ou F18 2013 en Toscane (160 équipages). Impulsion forte aussi  en 2013 sur des Championnats de France des classes (pas mal comme terminologie, non ? ;-) ) chez les Classe A (70 participants) ou Hobie 16 (51 équipages).

Cette énergie est d’autant mieux exploitée avec des choix judicieux de dates et de facilité d’accès au lieu. Le Championnat du Monde F18 en Irlande, malgré la beauté des lieux, les offres des constructeurs, et la qualité de l’accueil se profile pour le moment en deçà de l’effectif italien de 2013. La Sardaigne au mois d’octobre c’est top mais cela a privé les jeunes du Championnat d’Europe Hobie en 2013, Barcelone en 2014 est plus accessible et toujours très sexy, mais fin juin début juillet, à la fois pour les parents avec des enfants scolarisés et les jeunes en exams ou oraux de concours, c’est compliqué. Ici les dates à partir de mi-juillet sont certes sur les périodes estivales intenses mais constituent des approches plus ouvertes. Je reste surpris que la seconde quinzaine d’août ne soit pas explorée. Le téléscopage peut faire mal, comme le montre le succès de St Barth qui grignote sensiblement l’effectif du  GP de l’Armistice pour les F18.

S’entraîner c’est pratiquer

Il n’y a qu’à voir la montée en puissance des séquences d’entraînements calées sur les grandes épreuves pour comprendre la volonté du régatier en catamaran d’améliorer sa pratique et son niveau de jeu. Cela contribue aussi à faire moins de régates mais sur un espace temps plus long qui intègre une phase de préparation. Les catamarans sont techniques et même les plus rustiques d’apparence demandent un temps certain de calage pour jouer sans trop de frustration lorsque l’heure de la confrontation est venue.

3/4 jours d’entraînements par jour de régate au programme semble un ratio raisonnable pour constater des progrès lors des régates. Sans séquence pour combler les lacunes, pas de surprises les hiérarchies se reproduisent, c’est beaucoup moins rigolo et motivant.

La dimension préparation/entraînement est d’autant plus importante que le désir de performance, de dépassement est là. Sans parler de pic de forme et d’objectifs, comme l’applique, avec justesse à mon sens, les top planchistes français qui zappent Hyères  en avril car c’est Santander en septembre qui compte. Car  l’on est pas au top toute l’année, ce qui contribue au fait que nous sommes passé dans une ère de la régate qualitative.

4/5 régates par an: le bon rythme ?

C’est vrai pour le circuit olympique et sans doute pour la majorité des pratiquants du catamaran aujourd’hui. Intercaler dans une saison de 2/3  rendez-vous majeurs annuels de votre classe/tribu, une paire de régates locales ou de proximité en intersérie fait aussi partie de la séquence de préparation et donne un nombre moyen de régates équivalent à celui constaté par les classes. La fédération a augmenté, artificiellement, ce chiffre en changeant les règles qui font que la régate BBQ (indispensable) de club du samedi est intégrée dans le compteur.

Les organisateurs du raid des Corsaires ont fait le choix  remarquable d’alterner une année de jachère entre deux belles éditions. Cela s’intègre dans cette logique d’envie et de qualité. Trop de régates tue littéralement la régate. Il est aussi plus facile de maîtriser une flotte de 140 catamarans que de 200 et de mieux considérer ainsi les pratiquants en répondant à des attentes simples mais qui donnent l’envie de revenir. Dans le cocktail de la réussite un artiste du drapeau et du relevé de vent s’avère un atout non négligeable. Ici encore, les classes et leur élus pratiquants concourent positivement, en partageant une belle expérience terrain, à la réussite des épreuves.

Ce mix varié et subtil est aujourd’hui impossible dans la filière jeune.  Le calendrier fou enchaîne au printemps, les WE  « petites régates » de ligue  mais sélective pour le Championnat de France, rendez-vous  de sélection pour le Championnat ISAF  qui commence aujourd’hui une semaine après le National jeune et interrégionales dans la foulée. Ce qui  épuise littéralement compétiteurs, parents et clubs sur une période courte et scolairement intense. Un Championnat du Monde SL16, filière jeune, fin juin ne choque que les parents dont les enfants passent le bac ?  Cet aspect d’équilibre  du calendrier n’est pas anodin, il est à suivre  de près d’autant que c’est une mission première dans la délégation confiée par l’Etat. Ici la spécificité du catamaran de sport entre engagement physique et difficulté logistique supérieure aux planches ou dériveurs n’est pas considérée assez sérieusement.

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