La seconde loi de Newton énonce que l'accélération d'un solide c'est la somme des forces qui sont appliquées sur sa masse. A force équivalente, diminuer la masse c'est augmenter l'accélération et donc la vitesse. CQFD.photo: Franck Tiffon

Une des caractéristiques du catamaran de sport réside dans les grandes variations de vitesse du support. Avec le petit rappel de physique de la seconde loi de Newton il est facile de comprendre l’importance de ce paramètre. D’autant que les catas modernes ont un ensemble de réglages qui permet de reculer la limite et donc gérer la surpuissance. Si on rajoute que statistiquement, la répartition de la force du vent en régate suit une courbe normale qui s’articule autour du mou/médium, ce paramètre devient central pour s’imposer à niveau de matériel et d’équipages équivalent. Il est bien évident que des bons lourds avec des bonnes voiles, iront plus vite que des poireaux légers avec un moteur défoncé.

Darren Bundock vu le plan d’eau peu alimenté par Eole de Quingdao pour les dernier JO à Pékin avait tenté, vainement, de faire mettre en place une jauge de poids minimum pour le Tornado. Il craignait un équipage asiatique très léger contre lequel, malgré son immense talent il n’aurait pas pu lutter. Aujourd’hui Darren Bundock avec 11 kg de plus depuis Pékin, doit encore  prendre du poids pour l’AC45. Le poids d’équipage fait donc partie de notre pratique dès que l’on veut aborder le versant sportif.

Il serait inconvenant en judo ou en boxe  de faire s’affronter des légers contre des lourds, en rugby le poids des bébés fait partie du jeu. Faisons un petit tour d’horizon pour voir comment ce paramètre est régulé dans le monde du cata sportif:

-Pour l’intersérie, le calcul des rating du SCHRS intègre un poids d’équipier moyen de 75 kg. Cependant, et c’est une des grandes limites de ce système, le poids de 75 kg n’est pas imposé en course. Ainsi le rating des 15.5, SL16, VIper, Spitfire est calculé avec un poids d’équipage de 150 kg et on a sur le cata des équipages entre 110 et 130 kg. Une fois que l’on aura rajouté que 10 kg de masse pour le rating du SCHRS c’est 10/1000 soit 36 secondes par heure, on voit que le rating est ainsi mathématiquement malmené. Un équipage à 120 kg « gagne » 1 minutes et 48 secondes de compensation par heure de course. Ce n’est pas neutre.

La formule de Newton s'applique cruellement à chaque relance, dans du mou médium avec du clapot

-Pour le Tornado, SL16, D18, Classe A (75 kg mini pour le cata) et Tyka pas de poids mini d’équipage. La tendance lourde a conduit à des poids d’équipages assez light pour performer: Tornado: 140 kg, SL16: 125 kg, D18: 120 kg,  Tyka: 85 kg et Classe A à 80 kg pour l’équipier unique. Bien sur,  il  est toujours possible a des lourds de performer, mais statistiquement ceux qui gagnent sont très majoritairement à 5 kg près de ces chiffres.

-Poids minimum sur le SL15,5, le HC16, le F18 et l’AC45. Pour les 15.5 qui pèse 150 kg, le poids mini de jauge est 100 kg sans possibilité de gueuser: 99 kg d’équipage tu n’as pas le droit de courir. Le poids moyen des équipages retenus pour le stage national catamaran en SL15.5 tourne autour de 115 kg depuis 3 ans. Sur un HC16 pour les évènements jeunes la jauge c’est 112,50 kg pour les autres c’est 129 kg avec possibilité de gueuser dans les deux cas. Le poids optimum d’équipage en HC16 s’établi autour de 125-130 kg. En F18 (180 kg pour le bateau) pour le grand gréement l’essai d’un poids mini à 130 kg (avec 12,5 kg de plomb) prend fin à la fin de l’année. Si le World Council ne fait pas perdurer cette dérogation, il faudra atteindre 140 kg et gueuser à 5 kg. Le poids optimum est autour de 150 kg, le poids de jauge. Les formes modernes de « culs de barriques » jouent en faveur des équipages F18 plus lourds. Pour les AC45 les 5 équipiers doivent peser 85 kg en moyenne, soit 425 kg sur les 1.400 kg du bateau à aile rigide. Selon Mitch Booth, 30 kg est un écart significatif sur plus de 1.800 kg en mouvement.

Durant la belle étape de la Costarmoricaine entre Brehat et Perros-Guirec, Frédéric et Thomas double trap. sous spi. (photo CostArmoricaine, coll. Fred Moreau)

Discret, Frédéric Moreau n’est pas de ceux qui font du bruit et que  l’on remarque sur un parking. Pourtant ce trentenaire originaire d’Orléans a un parcours vélique marqué par la passion et une très forte détermination. Planchiste du centre de la France, il n’hésite  pas à basculer sur un nouveau support (le 49er), squatter l’ENV et le plan d’eau de Quiberon pour deux cycles particulièrement exigeants de préparations Olympiques. Sous contrat avec la Marine Nationale , il acquiert la rigueur sur le matériel et les entraînements, l’expérience
du haut niveau international et de la férocité de la bataille pour une  sélection au JO. En prime il obtient un Brevet d’Etat 2ème degré. Fort de ce vécu Frédéric accompagne Damien Seguin dans sa préparation pour les Jeux para-Olympiques. Il entre dans le monde du catamaran de sport avec l’aventure d’ADH Innotec de Vianney Ancellin et le développement du Diam 3. Il forme dès lors avec le bouillant barreur Thomas Sellier un des équipages majeurs de la Formule 18 en France, dans le top 15 mondial depuis une petite dizaine d’années. Ce grand spécialiste des raids (Champion de France des raids en 2004 et 2008, vice-Champion en 2009, vainqueur de la Catagolfe 2010 avec Gurvan Bontemps sur le proto Cirrus R) s’est lancé un autre défi le Dart 18: Champion du Monde en 2009, vice-Champion du Monde en 2010 avec Emmanuel Dode, il rêve de revanche pour le titre 2011. C’est tout le mal que l’on peut souhaiter au sociétaire du SN Locmariaquer, bientôt papa pour la 3ème fois, qui travaille pour la voilerie North de Vannes et un des coach les plus recherchés du circuit.

Catamag: qu’est-ce qu’une bonne voile de F18 aujourd’hui (GV, foc et spi) ?

Fred Moreau: Les voiles, ce sont le moteur, la plateforme, le châssis et le moteur doit être adaptée au châssis. En d’autre termes, pour des bateaux de dernière génération avec des carènes en U et avec beaucoup de volume (Capricorne, Nacra, Shockwave…) qui développent pas mal de puissance, on cherche à avoir des voiles relativement fines. Lorsque la risée arrive, la coque sous le vent ne s’enfonce (presque) pas, la coque au vent se soulève et le bateau accélère. Sur des bateaux plus anciens avec des carènes en V et moins de volume (Tiger, Diam, Alado…), on cherche des voiles plus puissantes pour compenser le manque de portance de la carène. En effet, au moment de la risée, la coque sous le vent s’enfonce et seulement après la coque au vent se soulève.

CataMag: quelles sont les principales qualités d’un équipier en catamaran de sport et les erreurs les plus fréquentes ?

Fred Moreau: Tom, mon barreur, dis souvent que l’équipier c’est 70% de l’équipage. Je ne sais pas si la proportion est juste mais c’est sûr que c’est un poste exigeant. Idéalement, il doit être grand et fin. Je le dis d’autant plus facilement que ce n’est pas mon cas (1,74m pour 77kg) après, il faut être agile, rapide, endurant (un peu de puissance ne fait pas de mal) et avec une bonne capacité de récupération pour pouvoir enchaîner les manœuvres.
L’erreur la plus fréquente est de considérer que les 2 équipiers ont des tâches bien spécifiques alors qu’elles sont complémentaires : au près, par exemple, si l’équipier ne choque pas la GV, le barreur aura du mal à tirer la barre pour lancer le bateau, à contrario, si l’équipier ne borde pas assez, le barreur ne pourra pas faire de cap.

CataMag: enfin quels sont tes projets pour 2011 ?

Fred Moreau: mes projets pour 2011, récupérer le titre de champion du monde en Dart 18 avec Manu Dodé, faire la saison F18 avec comme objectif principal le championnat d’Europe aux Canaries en décembre prochain. Au niveau professionnel, je travaille actuellement à la fabrication des voiles sur le plancher de la voilerie North Sails à Vannes. dès l’automne prochain, je vais donner des séminaires de formation, partout en France, autant sur l’eau qu’en salle. Il s’agit d’adapter pour la France ce que l’on appelle aux Etats-Unis le « North U ». Je vais me concentrer sur les réglages des voiles, un sujet important pour nos clients.

Merci Frédéric !

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